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 Poisson et poison [Nova]

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MessageSujet: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 0:31

Il/elle chantait. Seul(e). Boutique rarement vide de clients ; on trouve toujours assez fou pour commander des vêtements exotiques ; et remplie à ras bord de tissus, à croire que l'on pourrait nager dans le taffetas soyeux d'orient, ou plonger dans la soie clinquante de Chine. Mais pour la sécurité de nos clients, ce genre d'activité extra commerciales est interdite. Il n'en reste pas moins que dans le magasin de vêtements cousus maison, règne un énorme bordel, à croire qu'un troupeau de buffles à décidé de se dégourdir les jambes dans l'étroites pièce, chaque soir de pleine lune. Car la pleine lune... Morgan(e) ne l'aime pas. En même temps, la petite vie du travestit se constitue de cette façon, en une multitude de choses qu'il apprécie, ou, qu'au contraire, il n'apprécie pas. Morgan(e) aime les poissons rouges, le bruit rassurant de la pendule accrochée au-dessus du bureau, le plic-ploc des gouttes sur le sol lorsqu'il pleut. Mais Sa majesté du Larbin n'aime pas le grattement des ongles des clients contre ses tentures soyeuses, les fuites qui laissent passer de l'eau par tout temps, le craquement des semelles contre le molleton écossais. Des petits plaisirs simples qui peuplent sa vie de fantasmes pas vraiment sexuels. Rien de moins excitants que la vision d’un ongle crissant sur de la Tulle rouge. A imaginer les doigts avides des clients se refermer sur les tissus précieux, Morgan(e) frissonne, ses jolies lèvres rouges agitées d’un tremblement à peine perceptible.

Lucien(ne) connaît une énorme variété de tissus, mais ne les utilise pas tous dans ses créations, bien que sa plus grande passion, pour épuiser rapidement ses crédits à 4 chiffres et en avoir d’autres, soit d'acheter à tort et à travers de coupons de tissus. Oh, par exemple, en se promenant dans la rue, il/elle voit des rideaux à une fenêtre. Liquides et décorés d'autocollants imprimés. Tout de suite, des étoiles s'allument dans ses grands yeux bleus, sous ses faux airs d'enfant mal torché. Quitte à passer la nuit pendu à la sonnette, il harcèle les propriétaires de l'appartement pour qu'ils lui vendent les rideaux.
Heureuse consécration de sa passion pour la couture...

Le travestit peut passer des journées le menton appuyé contre le mur, au détriment des clients, à réfléchir sur une de ses futures oeuvres. Car, il est évident qu'il considère lui-même son travail comme de l'art. La robe en cartes de poker ? C'est lui. Le smoking brodé de filigranes d'or enroulés de topaze ? Encore elle.
Deux personnalités semblent cohabiter dans le corps gracieux, qui sautille de droite à gauche, comme s'il ne devait jamais prendre de repos, aussi infatigable qu’une poupée mécanique et tout aussi souple.

Enfin, pour une fois, il est assis, cul posé sur sa chaise, ses longs cheveux lâchés sur ses épaules maigrelettes. Aujourd'hui, il est vêtu d'une robe à panier, noire, avec des rubans volant de tous les côtés, et un grand décolleté plein, argenté, le tout formant un corset autour de ses formes étriquées. Difficile de définir son sexe dans ces conditions. De petites cartes à jouer pendent à ses oreilles, attachées en pendentifs. Ses jolis petits pieds de cendrillon sont glissés dans des rangers de guerrier et ses yeux, grands lacs calmes, sont soulignés à coup de grands traits noirs. Etrange contraste. Fort kitch encore une fois.

Il s'ennuie, alors il joue de l'aiguille sur les mèches ondulées de ses cheveux. Il pique, elles se défendent. Il prend un cheveu de sa longue crinière noire, si docile, et l'utilise comme le plus résistant des fils sur une chemise à dos ouvert. Dernière commande d'une allemande mariée à un gros porc communiste. Enfin, Morgan(e), n'insulte pas les clients voyons !
.
L'Oktopoco Fly est une boutique universelle. Vingt ans de plus et Morgan(e) aurait pu se déclarer Baba cool et aimant tout le monde. On peut se le permettre lorsque l’on est exubérant à ce point. C’est le genre de personne à sauter au cou du client qui entre dans sa boutique, que ce soit son huissier ou le maire en personne.
Justement, la clochette sonne, amicale et claire; la gérante saute de son siège, tourne la tête vers la porte, enthousiaste :


" Ouiiiiiiii ?! "
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 15:32

A la base, elle était juste allée récupérer des scripts pour une énième critique littéraire. Juste ça. Tu fous un pied l’un devant l’autre et réitère la manœuvre d’une façon assez régulière jusqu’à la maison d’édition qui faisait également office de local pour un journal. Donc, la mission était simple. Chercher son petit merdier qui allait lui rapporter beaucoup de sous avant de revenir chez elle, sans dévier du chemin prévu. Une fois avoir méthodiquement étudié la taille du bouquin à critiquer et discuté les contraintes qu’elle devait respecter avec son éditeur préféré, Nova sortit du bâtiment avec l’idée de rentrer chez elle ans dévier du chemin habituel, sans regarder autour. Les vendeurs avaient le don de rendre leurs vitrines fort attrayantes, un peu comme les publicitaires. Il arrivait qu’on tombe sur un produit archinulle auquel il fallait donner l’apparence d’un truc fantastique, essentiel, censé vous changer la vie. Difficile à pondre quand on savait que le produit qu’on mettait en valeur était le plus naze jamais créé. Malgré ça, certains se débrouillaient pour faire croire aux gens que c’était le meilleur truc jamais créé. Donnant une image alliant beauté et séduction, en faisant un produit accessible, mais néanmoins prestigieux. Les vendeurs embellissaient tout. Ils trompaient l’attente des consommateurs, et ça, peu de gens s’y attendaient.

Donc, de un, l’écrivaine détestait inverser les rôles. Normalement, c’était elle qui trompait les gens en faisant des pubs pouvant écouler 3 tonnes d’après-shampoing en un peu plus de deux semaines. Ses critiques étaient franches et saisissantes parce qu’elle avait le don de s’énerver sur commande. Et rien de plus bon qu’un peu d’adrénaline pour achever le livre le plus naze de l’année et accessoirement, l’auteur. Du coup, prendre la place de ses victimes n’était pas si palpitant que ça. De deux, les vendeurs avaient une fâcheuse manie de lui refiler des fringues pour mettre en valeur ses atouts de pute. Genre, des jeans qui avaient une tendance à vouloir s’introduire dans son cul, au détriment de son slibard. Des jupes au ras du bonbon d’une couleur fluo de préférence (sûrement pour qu’on la remarque mieux sur le trottoir). Bon okay, elle ne raffolait pas spécialement des pulls XXXL qui cachait les multiples plis de mamy, mais ce n’était pas une raison pour avoir un mauvais goût vestimentaire. Trouvant que ses arguments pensaient assez pour qu’elle n’aille pas faire un tour chez ses nombreux concurrents, la mamzelle avançait d’un pas majestueux sur les trottoirs de la ville en tenant les scripts d’une main tandis que l’autre empoignait une magnifique chose… The beignet banane/chocolat. Elle était au paroxysme de l’émotion gustative. Ca devait être interdit de la nourriture aussi bonne.

Bordel, elle ne pensait pas qu’elle habitait aussi loin. Généralement, sa majesté se déplaçait avec sa bagnole ou en taxi, mais aujourd’hui il y avait beaucoup trop de bouchons. Parfois il fallait un minimum de 4 heures pour faire 25kilomètres. Il régnait alors une étrange atmosphère sur la ville. Tout le monde était ou bien plongé dans un stresse profond, ou bien dans une torpeur particulièrement lourde. Peut-être que c’était à cause de la pollution où d’une humeur générale qui se voulait complètement naze. Comme si tout le monde s’était mis d’accord pour tirer des tronches à en faire mouiller un réalisateur de films d’horreur. Quand quelqu’un d’heureux passait devant eux – le seul qui n’était visiblement pas au courant du plan – ils le regardaient comme s’il venait tout juste de bouffer du laxatif. Ce qui pouvait très bien être le cas vu la rareté de ces gens là.

Ouah, non d’une pipe en bois ! C’était quoi tout ça ? Une vitrine était très… mhh… magnifiquement bien décorée. Même trop bien. C’était louche. Que pouvait bien cacher cette belle façade ? Un après shampoing qui rendait les cheveux collants et puait une odeur qui hésitait être le chewing-gum et le désinfectant ? Peut-être. Mais la curiosité était trop tentante. S’approchant furtivement de cette chose on ne peut plus suspecte, Nova souleva un sourcille navré en regardant le titre. Oktopoco fly. Charmant. Ca lui faisait penser à « octopode volant ». Même si le magasin de vêtement rabaissait dans son estime avec une vitesse plus rapide que prévu, la jeune femme posa une main sur la porte avant de la pousser. Diiiing Doooong. Diiing Doong. Et voilà. L’idée de passer inaperçue était morte, se faisant bouffer par les charognes. Un large sourire en tranche de pastèque dont les pépins étaient blancs l’accueillit. Oh my gode… qu’était-ce ?

C’était quelqu’un qui respirait le bonheur. Elle semblait avoir subi un lavage de cerveau. Ou pire. Nova scruta son front, en quête d’une énorme cicatrice. Mais rien. Sa majesté recula d’un pas, voir même deux, ne voulant pas risquer d’attraper ce que la vendeuse avait, quoi que ç’eut été. Cette chose la perturbait : on croirait le père Noël déguisé en civile. Le doute grimpait encore plus quand elle repensait à l’accueil plus chaleureux que prévu. Et en plus, il y avait cet espèce de oui trop optimiste pour être honnête. La vendeuse semblait attendre une réponse. Nova attendait également sa réponse. Merde, elle était censée dire quoi exactement ? « Oui, je vous propose toute une gamme de sextoys qui sont disponibles chez nous au « sex-world ». En même temps ça pouvait aider à se débarrasser de ces milliers de carats qui brillaient dans les yeux de la vendeuse qui, malgré sa profonde féminité, avait quelque chose de masculin.

- Pour ou contre la pu dans les cimetières ?

Mouais.
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 16:34

La folie créative, vous connaissez ? Non ? Pourtant tous les artistes, qu'il s’agit de grands couturiers ou de peintre pour mouches, l'ont. Le genre de truc qu’on aimerait avoir au moins une fois par jour, afin de ne pas rester comme un con devant sa feuille blanche. C'est le bouillonnement intense du cerveau, à l'approche d'une excellente idée. Un peu comme l'ampoule qui s'allume avec un "ting" retentissant et quelque peu emmerdant.

Chez Morgan(e) ce phénomène se traduit par l'ondulation de ses longs cheveux, à croire qu'ils ont décidé soudain de se déchaîner sur tout ce qui passe, bien que la Gérante ne leur laisse pas grand-chose à toucher. Le fait qu'il soit un Wild y est pour beaucoup. Mais en général, les clients, absorbés par la caverne d'Ali Baba, tout excités à l'idée de commander la dernière "robe extra top super " à la mode, ne s'en aperçoivent pas. A croire qu'ils ont du caca dans les yeux dés qu'ils entrent dans la boutique.
C'est l'émotion de l'innocence qui emplit le regard du premier visiteur, ou le plus habitué même. Chacun redevient môme, dés son premier pas dans l'Oktopoco Fly. La porte poussée, leurs glandes cérébrales s’estropient et hop, plus aucune question à se poser autre que la couleur du caleçon commandé. De ce fait, la gérant(e) en a déjà vu des vertes et des pas mûres : un conseiller en aviation faire le gosse devant un smoking au col cousu de papillons, pour un rabais. Inutile de noter donc que pour ce genre de choses, Morgan(e) est tout à fait inflexible. Ses œuvres d’art, bien qu’elle les veuille universelles, doivent être payées au poids du tissu. Et puis, c’est technique ; plus les gens voient un truc cher, plus ils se disent que c’est beau. On a déjà vu vendu le plus beau caillou du monde à un million de dollars cash, juste parce qu’on l’avait exposé au Louvres sur un piédestal. Rien de très impressionnant en somme.

Cependant, reprenons l'affaire où nous en étions. Le menton fermement pointé vers la porte, le travestit voit apparaître une fille. Ah, tout ce qu'il y a de plus banale. Et même un peu mal habillée. Enfin, nous ne sommes pas là pour critiquer les clients. Longs cheveux blancs lisses qu'il imagine déjà coiffés en multi tresses piquées de petites cartes de poker. De plus, cette jeune fille paraît blasée. Pas touchée par la touche de gaminerie qui emplit pourtant la boutique. Un peu de perlimpinpin et tout devrait s'arranger ?

Blasée, d'accord. Et gênée aussi peut-être.
Morgan(e) sauta de sa chaise, énergique, avant de s'approcher de la jeune femme avec la patience d'un chasseur de fauve. Sans répondre à sa question, il l'observa scrupuleusement :


" Pub dans les cimetières... JOKER. "

Elle prit une carte à jouer dans l'une des poches étroites de son corset : as de trèfle ; pas de chance, et la glissa dans la main de la femme lentement, avec la même passion que si ce fut l’amulette sacré de Ramsès deux. Après tout, c’est aussi pour les cadeaux bonus que les clients viennent. Des grands gamins je vous ai dit :

" C'est pas le jour des sondages aujourd'hui. Revenez demain. Ou après-demain. Ou même la semaine prochaine et l'an qui suit. JOKER je dis. Mais si vous voulez visiter, la Porte du Chapelier Fou vous est ouverte. "

Faisant jouer un mètre mesureur dans sa main, apparu comme par magie, elle souriait à nouveau, comme si aucun intrus à la face de vampire blasé n’était jamais entré dans son petit commerce si brillant. Et puis, c’est vrai que cette fille ressemblait à un Dracula miniature et moins effrayant, avec son teint de geisha exportée du Japon. A croire qu’elle avait oublié de retirer une copieuse coucher de fond de teint, à moins que cela ne soit naturel.
L’énergumène étudia cependant longuement le corps de la jeune femme, du coin de l’œil. Si elle faisait une demande, ce genre de savoir était important ; il avait tout de même appris à reconnaître la taille du soutien gorge d’une femme au premier regard. Bingo !
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 18:49

Les mains pleines avec un futur livre, Nova scrutait tranquillement la vendeuse devant lui, comme si cette dernière était le chef d’œuvre le plus sublime du siècle, la pièce maîtresse du musée du coin. Et bon, les musées ce n’était pas sa tasse de thé, autant dire alors que le dit mur ne la passionnait pas plus que ça. Son regard était fixe, un peu flou. Ses seuls mouvements venaient d’un léger coup de vent qui passait par la porte encore ouverte, s’engouffrant dans ses mèches claires et les faisait voltiger dans tout les sens. Nova qui mettait pourtant un point d'honneur à toujours être impeccablement coiffé, avait décidé depuis quelques temps de ne plus faire aucun effort à ce sujet, trop blasée de toujours voir son chef d'oeuvre capillaire partir en sucette au moindre petit coup de vent. Retirant sa main, elle laissa la porte se fermer en toute quiétude. Celle-ci percuta une fois de plus la clochette en lâchant le fameux « Diiing Dooyoyong ».

Devait-elle mettre se comportement niais sur le compte du manque d’expérience ? Sans doutes. Soudain, un petit quelque chose se glissa dans sa main à présent libre. Oh ! Qué cé c’est ? Relevant lentement son bras, elle regarda ce qui était visiblement une carte de poker. As de trèfle. Après une courte observation de la carte, il glissa celle-ci dans son soutien-gorge. La chemise qui le recouvrait était exceptionnellement entrouverte au niveau du col, pas assez pour se coller une angine carabinée, mais suffisamment pour se la péter. Nova soupira en secouant la tête, amusée malgré elle par la scène, et releva vivement les yeux lorsqu'une douce mélodie résonna à ses oreilles. Quelle énergie, quelle poésie… quelle poisse. L’espèce d’homme/femme était encore jeune. Et la règle clamait haut et fort : la jeunesse ne marche jamais sans l’arrogance. Celle-ci se foutait quelque peu de sa gueule. Quoi de plus naturel que de faire ça devant un client qui avait peut-être l’intention de débourser des millions pour vider son magasin de tissus. C’était tout en son avantage, évidemment. Ne réprimant pas le sourire en coin qui s’imposait, Nova pencha la tête sur le côté, et contourna la pauvre femme qui essayait d’avoir l’air classe, mais qui n’y arrivait pas… Quoi que peut-être si, un peu. Juste un peu. Mamzelle n’était pas généreuse à ce point. Avançant dans la petite boutique, elle soupira en contemplant les différents vêtements.

- Ca fait à peine 2 minutes que je suis là et tu veux déjà me revoir.

On pouvait appeler ça l’art de détourner tout ce qui est négatif vers quelque chose de positif, mais que dans un sens. Nova était elle aussi jeune et avait son lot de cynisme. C’aurait pu être une question, si seulement quelqu’un d’autre l’aurait dit. Mais non, dans son cas, cette phrase était une affirmation. Ca ne laissait pas le place au doute et une quelconque réponse. Son pouvoir était incontestable.

- Exercice : Un homme s’est dissimulé dans cette boutique, sauras-tu le retrouver ?

J’ai dis, incontestable. Un travesti. Magnifiquement bien déguisé d’ailleurs. Mais on ne trompe pas une femme dont l’odorat et plus développé que chez quiconque. Elle avait beau sentir le parfum, l’odeur du tissu, celui du savon, du shampoing, du dentifrice… celui du mâle perçait. Après tout, c’était normal, un animal, ce qu’il cherchait en premier c’était à déterminer le sexe de son partenaire et si celui-ci utilise du Schwartzkopf ou du Loreal. Pour le moment, ce qui l’intéressait était de piquer dans le vif, après, la réaction, elle s’en branlait un peu (bien que ce soit un propos difficile à illustrer). Stoïque, elle remplit ses poumons d’air plein de particules de cuivre et de poussière avant de secouer la tête, comme pour faire le vide. La boutique était néanmoins, très sympathique. Les couleurs plaisaient aux yeux. L’ultime vengeance aurait été de publier une petite critique qui poignarderait dans le dos le travesti. Bien que très alléchant, sa manquait décidément de classe. Donc, c’était à rayer de la liste des choses à faire avant de mourir. A part si la situation le lui demandait poliment.

Esquissant un léger sourire, elle se retourna sur la pointe des pieds avec un angle parfait de 180°. Faisant dos à la vendeuse, la reine fit quelques pas vers l’avant avec un air majestueux. On aurait dit une boutique pour écologistes avec plein de couleurs et un… Nova tenta de donner un nom à la chose rouge dans le rayon, sans pour autant y parvenir. Elle fronça les sourcils et changea son rictus en un sourire moqueur, voire blasé par la situation. Ok, elle n'était pas tombée sur une boutique normale, si tant est que la normalité existât dans ce lieu de débauche permanente. Non, ici la normalité était une rareté, voire une utopie. Ciel.
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 19:54

« Le coiffeur a raté votre coupe ? »

Dans le monde superficielle de la mode, le bien aimé client ne révèle de l’acidité dans ses mots que lorsqu’il n’est pas satisfait de quelque chose dans sa propre apparence. C’est psychologique. Mauvais réveil. Mauvais petit déjeuner. Mauvaise partie de jambes en l’air. Mauvais temps. Et éventuellement, mauvaise coupe. Hors, à voir la crinière ébouriffée de la jeune femme, Morgan(e) n’en doutait plus. Son humeur douteuse, aussi charmante que celle d’un serpent dont on a écrabouillé la queue avec la douceur d’un pachyderme, venait du fait que sa coiffeuse avait foiré sa coupe. Pas d’autre solution à l’ironie qui pointait dans chacun de ses mots, pratique peu commune des clients friqués. Les clients aisés sont toujours de bonne humeur, imbus d’eux-mêmes, sauf lorsqu’il faut ouvrir le porte monnaie. D’habitude, c’était « wouaaaaaaaaaah, des chaussures en poils de fourmilier, magnifique ! » [depuis le temps, il aurait dû se faire chopper par la PETA] et, nul besoin de jouer les clowns pour rehausser l’humeur des passants naïfs… et riches. L’attrape con parfait. Morgan(e) arriverait à leur vendre un chapeau cousu de fesses de babouin, qu’ils prendraient évidement pour de la mode pure. Après tout, Karl Lagerfeld avait bien réussi à solder une robe en pellicules de films, hautement inflammable. Morgan(e) avait beaucoup ri le jour où elle avait appris que la vente de la robe s’était finie par un joyeux feu de camps sur le podium [véridique !]. Enfin, comme quoi le client est aussi con qu’un dindon américain, prêt à acheter tout ce qu’il y a de plus cher et de plus inutile. Quoique… Ce qui se trouve dans la boutique de sa Majesté du Larbin est tout de même bien chic, et essentiel pour s’habiller. Aurait-on vu les riches de ce monde se balader à poils dans les rues ? Non. Donc à gens riches, couturiers malins comme des singes. Oktopoco fly vient quand même de là. Morgan(e) est aussi loquace qu’une pieuvre, mais elle ne s’envole pas par la fenêtre. Inutile de chercher un sens logique là-dedans, il n’y en a pas tout simplement. L’inutilité à l’état pur. Et créatif avec ça !

D’autant plus que cette agréable jeune femme avait mis le doigt sur un point sensible. La travestit haussa les épaules, avec un éloquence digne de Gandhi. Non, de toute façon, la cliente n’avait aucune preuve mais venir dans une boutique spécialement pour balancer ce genre d’incohérences à la figure des gens, elle était flattée de cet honneur. On ne reçoit pas tous les jours la visiter de gens venus uniquement pour vous. Depuis le temps, lui-même ne savait plus si elle était homme ou femme. Quand elle prenait une douche, ce n’était pas pour regarder ce qu’il avait entre les jambes. Oh, choc. :


« Tutut, si vous le dites. »

Autant dire « Tu peux aller te brosser, j’te dirai pas ce que je sais ». Et d’ailleurs, peut-être que la jeune femme n’avait pas précisément envie de savoir. Bref, le je m’en foutisme le plus total se lisait dans son regard, aussi précis que si elle avait fumé trois joints à la suite. Plein d’une brume arctique, saupoudrée d’une pincée de cynisme ambiant. Pas de quoi s’alarmer pour de telles réactions anti sociables. On change toujours d’avis d’un moment à l’autre, ce sont les aléas du destin communs à ce genre de métiers. La couture dissimule une grande passion pour la persuasion. Toujours mieux faire et se donner à fond dans tout ce que l’on exécute, dans les larmes ou avec le sourire.
Le travestit retroussa son nez aquilin, avec une moue des plus joueuses :


« Cherchez-vous quelque chose de particulier ? Il me semble que c’est la première fois que vous venez, mais si vous me parlez déjà d’un retour, à votre manière certes… »

L’harcèlement des clients, une catégorie dans laquelle elle était passée maître. Mais, c’est qu’ils aiment qu’on s’intéresse à eux ces chers canailloux, prêtes à vider leur porte monnaie dans la caisse gourmande. Faire les Soldes dans un magasin où l’on connaît le gérant, c’est comme aller à une psychanalyse gratuite. Et d’une pierre deux coups !

Il se détourna longuement et s’écarta de quelques pas, le temps d’aplatir de ses rangers quelques coupons de tissus qui avaient décidé de s’envoler au courant d’air produit par la porte. Morgan(e) repoussa ses mèches grouillantes sur son épaule élégamment, la Marseillaise aux lèvres. L’esprit patriotique le prenait parfois sur le reste. Autant afficher son appartenance haut et fort, tant qu’à faire !
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeSam 29 Mar - 22:57

Okay, okay, on ne récolte que ce que l'on sème. Or, la moisson était bonne, donc, les grains aussi. Satisfaite par l'effet que produisait sa bonne humeur et son enthousiasme, Nova esquissa un sourire avec une nonchalance étudiée. Rien que cette réaction lui suffisait pour avoir l'impression d'être intouchable. Continuant sa longue marche majestueuse à travers les rayons, elle regardait ce que l'on pouvait communément appeler "vêtements à la mode". Ce n'était pas vraiment son genre de trucs. Elle préférait largement des fringues négligés qui lui valaient son statut d'écrivaine pas loin d'être millionnaire. En effet, allant chopper les scripts chez sa maison d'édition, il ne lui restait plus qu'à se foutre en sous-vêtements dans son appartement et passer sa journée à lire, à écrire et à mater la télé à la recherche de la muse. Le petit avantage de ce métier juste après la thune : elle pouvait se permettre d'être paresseuse. Cette chose si exquise qu'on pouvait tirer avec volupté. Ses doigts fins de pianiste s'amusaient à frôler les tissus assez hauts et doux pour qu'elle daigne les toucher. Mhh, elle en oubliait presque le but de sa venue aussi. Si seulement il y en avait un, mais ce n'était sûrement pas de jouer au chat et à la souris avec un travesti qui usait des mots avec un total manque de classe. Quel dommage, elle l'avait pourtant portée haut la première fois. Bien trop haut ce qui rendait la chute beaucoup plus rude que prévu. Avec une certaine hésitation, sa majesté se retourna et fit face à un miroir. Depuis quand était-il là ? Ce n'était pas son genre de se ratatiner au point de rater un détail aussi important. Chemise blanche déboutonnée avec une précision machiavélique pour laisser entrevoir un bout de sa poitrine d'où ressortait la petite carte : as de trèfle. Au cou, son petit dada : un collier de chien noir à petites piques en forme de dents de requin qui ne faisait que mettre plus en valeur l'éclat blanc de sa peau d'albinos. En bas, jean taille basse, noire également, étroit au début avant de se barrer en couilles, se déchirant et se pliant dans tous les sens. Et puis aux pieds... bah bien nus en fait. Négligé quoi.

Ayant finit l'observation de son reflet, mamzelle sauvage se retourna vers la vendeuse avec un air assez difficile à déterminer, mais qui était censé annoncer la bonne humeur. Seulement si personne ne venait l'entraver, évidemment. Le bonheur du travesti ne tenait qu'à fil, car rien de plus beau qu'un client qui était content, n'est-ce pas ? S'autorisant un léger sourire, Nova ne daigna pas répondre à la première question qui n'était que pure provocation. Une petite traîtrise de la part de la vendeuse qui pensait la lui faire gober. La jeune femme entreprit donc une marche tellement lente qu'elle en devenait sensuelle. Un pas après l'autre, comme un top model sur son podium avec des talons de 10 centimètres qui étaient en l'occurrence, absents. Une mélodie bien connue s'introduit dans son oreille alors qu'elle n'était plus qu'à quelques mètres de son but. Oh my gode (oui c'est un tic linguistique) ! Vite, il fallait faire taire cette chose ignoble.

- Si quelqu'un vient ici, c'est certainement pour chercher quelque chose de particulier. Cette boutique à plus les couleurs du paradis D'adam et Eve que celles de l'H&M du coin.

C'était le genre de phrases que les gens pouvaient prendre comme ils le voulaient. Quelqu'un pouvait très bien détester la bible et alors, ce monologue risquait de se transformer en source d'un interminable débat sur l'importance de Dieu dans notre société. Bla bla bla, les religieux nous pompaient le cerveau en nous enfonçant des images saintes dans le trou de balle sans lubrifiant. Beun, si ça pouvait rendre quelqu'un heureux, pourquoi pas. Et de même pour quelqu'un qui vénérait l'H&M, qui devaient être aussi nombreux que ceux qui lisaient les modes d'emploi. Mais pour le moment, ce qui était le plus bénéfique pour Nova c'était que le travesti le prenne comme un compliment. La plus part du temps, les gens adoraient les particularités. Tout ce qui ne semblait pas faire parti du commun du mortel les intéressait. Personne ne voulait être comme monsieur tout le monde. Cependant, personne ne voulait non plus être trop particulier. Un certain trait de caractère voulait que tout être vivant ne dépasse pas une certaine limite qui faisait qu'un humain pouvait encore s'appeler humain. Certaines disaient que cette limite se prénommait "la morale". Mais ce qui était le plus intéressant, c'était d'exploiter son imagination afin d'essayer d'atteindre ladite limite.

- Quelque chose qui fait baroque punk. Rouge pourpre de préfèrence avec du noir.

Elle avait toujours voulu essayé un truc dans le genre. Robe tango ultra longue, somptueuse et décorée par un motif dit baroque, découpée sur le côté pour que quand elle marchait, sa jambe, recouverte par un porte jarretelle et collant bas, paraisse encore plus fine et saillante. Corset rouge et noir, boucles anglaises, éventail en plumes, petit chapeau melon ou haut de forme, qu'importe... ce style avait la classe. Yearh.


Dernière édition par Nova le Dim 30 Mar - 14:16, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeDim 30 Mar - 0:43

Ô jouissive et bandante créativité.


La demoiselle avait donc fait le choix de devenir fourmi albinos au milieu du raz-de-marée sombre de la banale fourmilière. Manœuvre à saluer de façon bien basse, et de telle manière à ne pas se faire un tour de rein. Trois milliards d’êtres humains communs, sans compter les milles personnes environs dont le travestit avait sauvé l’âme. La couture, c’est aussi une histoire de religion. Être mal habillé, c’est s’offrir tout entier au croque mitaine du regard des gens. Qui prendrait au sérieux quelqu’un qui porte un sac poubelle sur la tête ? Personne évidement.

Il fixa sur la jeune femme un regard clair, où se mêlaient amusement et force folie. La folie est l’ingrédient essentiel à un travail aisément construit, fait connu de tous. Elle fit tourner entre ses doigts délicats le mètre mesureur, un sourire joyeux aux lèvres, comme si cela fut le premier. Assez authentique. Mais teinté tout de même d’une touche de fausseté, comme s’il faisait intégralement parti d’une publicité pour dentifrice. « Colgate blancheur, souriez, vous êtes filmé ». Il ne faudrait tout de même pas que la jeune femme aille s’imaginer que la gérante se fout royalement de sa poire. Enfin, de revirement d’avis voyons. Ce n’est pas le style de Morgan(e) d’afficher de manière aussi délibérée la jouissance qu’il ressent à voir un nouveau client changer de bord après avoir été sceptique. La gloire du croisée de la mode sur le fanatisme du négligé. Les vêtements avant-gardistes gagnent toujours, muhahahaha.

Non, son ironie à lui est si ancrée dans son être que les humains ne s’en aperçoivent même plus. Et de toute façon, elle n’en fait que rarement dans ses phrases. Humilier quelqu’un, ce n’est pas pour lui. Lorsque l’on travaille à son compte, on a intérêt à être parcimonieux et à ne pas être radin sur les compliments. « Oh, cette robe vous va à merveille. », « Magnifique ! », « Vous devriez être mannequin. Cela vous arrondit votre incroyable fessier. ». Cette part hypocrite ne dérange personne de toute façon, que ce soit honnête ou pas. Aussi, Morgan(e) haussa un sourcil curieux, lorsque la jeune femme lui balança le compliment, comme un touriste qui jette une cacahouète avariée à un singe dans un zoo. Seulement, rien que pour faire plaisir, ou illusion, le sourire peinturluré de Sa Majesté du Larbin s’élargit, énorme banane blanche à contours rouges plantés au milieu de son visage poudré.

Avec une aisance démoniaque, le chapelier Fou fit voltiger sa robe, lorsqu’il pivota vers son comptoir, alors que le panier à lui tout seul faisait au moins 5 kilos. Sans compter le poids des froufrouteries et compagnie.
Il y ramassa, au milieu du bordel ambiant, un calepin d’artiste de rue, déjà couvert de divers croquis. Jupe à nœuds, chemisier à manches bouffantes, la créativité de son cerveau bouillant s’y déversait sans bruit autre que celui du grattement du crayon contre la feuille :


« Une demande précise en ce qui concerne le vêtement ? Jupe ? Robe ? Pantalon ? Ou choix libre ? Je vous verrai bien, personnellement, avec de la soie. Quelle que soit la couleur, la matière ferait écran sur votre peau. Très laiteuse je dois avouer. Je peux vous proposer de nombreux modèles, mais le client est tout de même Roi… Ou Reine, au choix. »

Elle s’installa tranquillement sur un tas de tissus entassés sans ordre précis. Le taffetas se marie avec la fourrure, etc... Endroit fort confortable. Véritable petit nid de poussière et d’acariens. Mais pas de soucis, le lavage des coupons est garanti par la maison.
Baroque punk. Le mot en dit assez long sans définition. Qui dit punk, dit détartré. Fumette, toussa, toussa.... Le travestit n’aurait jamais imaginé que ce genre de style grunge convenait à la jeune femme. Enfin, tous les goûts sont dans la nature. Elle l’aurait bien vue habillée d’un manteau de fourrure blanche ; peut-être de la fontanelle. L’innocence immaculée ne convient qu’aux personnes qui ont un visage pur. Hors, rien n’est plus pur que la peau blanche d’une personne aussi blême qu’un mort vivant échappé des catacombes.

Reportant son regard cerné de noir sur la silhouette fine, il s’ingénia à lui enlever ses vêtements mentalement. Exit le jean. Un streap-tise mental, jeu auquel elle s’amusait généralement beaucoup. Tombé la chemise. Et ne reste qu’un corps de mannequin, aussi délicat que celui d’une poupée de porcelaine, datant de six siècles en arrière. Vision qui aurait été excitante pour un homme normalement constitué mais étant donné que dans le cas présent, c’était le travestit qui s’occupait de son cas, celui-ci s’en branlait pas mal. Bien pratique une vie d’hermaphrodite.
Avec une énergie aussi inépuisable que les OGM, Morgan(e) se redressa presque aussitôt et s’activa autour du corps de la jeune femme, prenant largement les mesures alors que celle-ci était encore en mouvements :


« Souhaitez-vous un vêtement fait sur mesure ou quelque chose qui se trouve déjà en stock ? » Demanda-t-elle

Au service du client, mais pas à la botte du client. C’était quand même elle qui ouvrirait son porte monnaie en fin de compte. Attendons donc son avis sur la question. Le couturier met son fantasme en réalité. Néanmoins, tout dépend du client. Client. Client. Client. Quel mot énervant !
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeDim 30 Mar - 16:11

Elle était fascinée par l’extrême tension électrique, palpable, tremblée, qui pouvait se créer entre un homme et une femme qui ne se connaissaient pas, sans raison particulière, comme ça, simplement parce qu’ils se détestent où se plaisent et luttaient pour ne pas le montrer. La jeune femme fixait les yeux bleu clair et croyait y reconnaître ce petit pois de folie qu’elle voyait très souvent chez les esthètes. Celui-ci semblait crier « Youhouou ! » du fond de ses pupilles ce qui avait un effet assez amusant. Par conséquent amusée, Nova souleva un sourcille sceptique comme si elle doutait du fait que rentrer dans cette boutique était vraiment une bonne idée. Malheureusement, les vitrines étaient souvent un aimant à préjugés. Elle la regarda faire demi-tour vers le comptoir et la suivit dans sa marche et regardant attentivement sa robe voler au rythme des hanches. Ca lui faisait vaguement penser à un film au ralenti. Le tissu ondulait, du haut vers le bas, comme une vague qui roulait sur le sable. C’était sûrement l’un de ses spectacles préférés. Le corps des femmes était tellement beau. « La beauté réside dans les courbes et non les lignes droites ».

Une fois arrivée devant le comptoir, elle observa le travesti attraper un espèce de carnet avant d’aller s’installer sur un tas de futur vêtements en lui débitant un texte appris par cœur. Eh bah non, justement, elle ne savait pas du tout ce qu’elle voulait et c’était pour ça qu’elle était là. La vendeuse lul avoua même (sous la torture) que sa peau était laiteuse. En effet, antécédent de son ADN Wild qui se voulait albinos. Mais celui-ci avait atteint qu’une infime partie de son corps ce qui rendait la pigmentation plus naturelle. Large étendu de maquillage qui faisait penser à du plâtre. Quelle perspective optimiste. Bref, que voulait-elle ?

- Robe, longue, coupure sur le côté, de préférence pourpre.

Ce n’était pas dans ses habitudes de vouvoyer les gens. Le faire, creusait un fossé entre celui qui parlait et celui qui écoutait. C’était bien trop snob pour être sérieux. On pouvait respecter quelqu’un de bien d’autres façons beaucoup plus apodictiques. Esquissant un léger sourire, elle posa son script sur le comptoir dans un mouvement brut, comme si c’était un truc ultra lourd et ultra chiant. Ce qui n’était pas vraiment le cas d’ailleurs. De petites particules de poussière se dégagèrent de la surface lisse et vernie en laissant une vague impression que la chose posée était vieille et prête à tomber en poussière. Un titre gras et grand pouvait se lire sur la première page sous la fine pellicule en plastique : Courir sous l’eau. Vu de côté, ça avait l’air ‘achement grand. Déviant ses yeux verts olive, Nova fixa à nouveau le travesti qui la regardait bizarrement. On aurait dit un photographe qui s’imaginait les poses qu’il allait faire prendre à sa pauvre victime. Puis, l’artiste se leva et se précipita vers le model pour prendre des mesures. Soudaine prise de conscience du fait que c’était sa cliente et non une pièce de Michel Ange ? Peut-être. Dans un soupir imperceptible, elle réfléchit à la question. Qu’est-ce qui pouvait être mieux : choisir un truc super cher en vitesse pour faire plaisir et partir, ou laisser faire l’artiste dans une longue inspection de son corps de nymphe et ressortir en vêtement de l’époque Pompidou ? Sans doute la deuxième, elle était beaucoup plus alléchante. Payer pour un travail fait avec soin dans les règles de l’art était beaucoup plus séduisant que payer tout court.

- Sur mesure je te prie.

Elle voulait voir la couturière en pleine action, avec aiguilles, mètre mesureur, tissus de toutes les couleurs etc., etc. Et puis c’était beaucoup plus agréable de se sentir encore plus unique avec quelque chose de fabriqué sur place. Elle regarda attentivement le travesti posé devant elle avec une lueur étrange dans les yeux, quelque peu gélatineuse.

- Je te laisse champ libre sur mon corps de déesse.

La confiance était indispensable dans ce cas là. Après, elle pouvait toujours intervenir, mais quelque chose lui disait qu’elle n’aurait pas besoin de sortir son artillerie de guerre. Cependant, chacun avait sa vision de la classe, de l’élégance, de la sensualité… Cependant, tout n’était qu’une question de moue et de poses. Les vulgaires nommaient cela l’érotisme, alors qu’il ne s’agissait que de pornographie, c'est-à-dire, de sincérité. C’était aussi ça être mannequin, savoir mettre en valeur n’importe quel vêtement même si on ne l’aimait pas. Une belle femme n’était rien si elle n’avait pas de charme. Dure, dure…
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeDim 30 Mar - 18:47

Avec sa frivolité habituelle, aussi connue de tous que son exubérance à embrasser son poisson rouge ; qui dit ADN de pieuvre, dit aussi amour débordant des poissons; Morgan(e) s’activa à tournoyer dans tous les sens, autour des formes harmonieuses de la jeune femme. Par bonheur, les idées venaient toujours à point, sans se faire attendre sur le quai. Ce serait mal venu une idée qui rate son train. Les yeux bleu s’éclairaient aussi sûrement au fil des pensées onctueuses. Une robe unibretelle, rattachée à ce collier très kitch, aussi discret que celui d’un molosse enragé. Une succession de « ting » fort peu mélodieux retentissaient dans son esprit inventif.
Au fur et à mesure que le travestit, et sa mémoire de baleine arctique, prenait en note les mensurations de la cliente, la couvée de tentacules qu’elle avait tendance à appeler « chevelure rebelle » notait, mû par de sombres instincts, les chiffres sur le calepin qu’elle leur avait abandonné. Quelle utilisation plus pratique pour ces mèches fébriles et aveugles, que d’être enfin demandées par Sa Majesté Du Larbin ? Il y a encore pire larbin que soi-même. Les Larbins du Larbin. Lorsque l’on a l’habitude se présenter comme étant sa Majesté du Larbin, il fait bien avoir quelque chose, autre que l’habituel machine à laver, à son service.

Néanmoins, les mèches tenaient correctement leur office, les feuilles volantes coincées entre elles, et griffaient dessus des lettres maladroites et tremblantes. La fonction première des tentacules n’est pas d’apprendre l’alphabet que diable ! C’est à peine déjà si elles savaient écrire le nom de leur propriétaire. Pourtant, ce n’était pas faute d’essayer de les discipliner mais la couvée de serpents furieux semblait avoir sa personnalité propre, bien qu’elle obéisse sans discuter aux manœuvres du Chapelier Fou, aussi attentive qu’une classe de troisième. Tandis qu’elle/lui marmonnait les mesures, au fur et à mesure qu’elle les déchiffrait sur le corps livide, le grattement des tentacules noires s’amplifiait, remplissant la pièce de bruits dignes de film d’horreur. Les dents de la mer. La Petite Sirène. Capitaine Cousteau. Faramineux.
Les mèches rebelles râpaient contre le papier avec la même régularité qu’une râpe à fromage sur son quotient de reblochon puant.

La plupart de ses clients avaient déjà remarqué par le passé l’appartenance à la race Wild, persécutée par tous les skinheads du coin. Mais la perspective de ne plus avoir de bon génie personnel, quoique coûteux, à leur service leur clouait le bec. Et puis, on peut sans mal imaginer l’image que ça donnerait : « Ah, tu as fait coudre ce mini top hyper seeeeexy par un Wild ? Ah, mais tu t’es fait arnaquer, c’est répugnant. » La peur d’être humilié prend toujours le pas sur le reste ; c’est un instinct de l’homo sapiens. Déjà par le passé, l’homme préhistorique avait du mal à ne pas baisser la tête lorsqu’il ne ramenait pas le cuisseau de mammouth promis. Donc, aucune crainte à avoir, à exposer le spectacle harmonieux de la danse des tentacules. Excellent titre pour un bouquin ça.
A propos de bouquin justement, la jeune femme en avait posé un au milieu de l’entassement infernal du bureau. Le travestit se demanda vaguement si elle était écrivain, ou simple amateur d’œuvres épaisses comme l’ongle d’un T-rex :


« Alors, vous avez demandé robe. Demande prise en compte évidement. Vous travaillez dans l’écriture ? » Questionna-t-elle mécaniquement de sa voix anormalement fluette. Simple formalité de politesse.

95-56-82 cm, 1m71. Les mêmes mensurations que celles d’une poupée Barbie. Quoique un peu pitite. Enfin, ce n'était que les mesures préliminaires. Il rembobina gracieusement son mètre mesureur, et observa à nouveau la demoiselle de Trèfle, longuement, d’une manière inspirée. Le moyen de mettre en valeur ses longues jambes, et sa peau laiteuse ? Simple, sans avoir besoin d’être particulièrement créatif :


« Bon, bon… Souhaitez-vous rester dans les parages ou faire un tour dans les environs ? »

Elle reprit son calepin des pattes de ses tentacules, et le lança à travers la pièce vers son comptoir, éjectant une tonne de papiers. Sa main s’éleva avec élégance au-dessus de ses mèches, alors qu’elle accomplissait une prouesse digne d’un lanceur de javelot aux JO :


« Fufufu, hu. Cela ne prendra pas longtemps rassurez-vous. Pouvez-vous cependant me prêter le collier que vous portez ? »

Ses pupilles dilatées glissèrent sur le côté, lui permettant de distinguer en coin la silhouette floue de la demoiselle de Trèfle.
Puis, son buste plantureux pivota en entier, avec un mouvement gracieux du menton. Elle écarta quelques froufrous perdus dans les méandres de son cou pâle, les ondulations frénétiques de ses tentacules se calmant progressivement, une fois la séquence émotion passée.


It has find !
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeDim 30 Mar - 22:47

Nova foudroya les tentacules du regard, et constata un centième de seconde plus tard, et avec un stoïcisme vaguement fataliste que cela n'avait aucun effet. Ce qui était on ne peut plus normal pour des cheveux gesticulant tels des tentacules de pieuvre. L'odeur marine qu'elle avait senti depuis que l'énergumène tournait autour d'elle n'était donc pas la par hasard. Tout à coup, elle vit les sushi, qui se trouveraient immanquablement dans son assiette au prochain repas, prendre la forme de la tête du travesti. Horreur. Encore un de ces jeunes Wild que la plus part des gens détestaient. Oh oui, il fallait qu'il y ait quelqu'un à détester. Il y avait toujours quelqu'un à détester. Soit, chacun détestait quelqu'un dans son coin, soit le monde entier attendait qu'un certain Mister X, multimilliardaire super connu, pointe du doigt sur une race bien précise. Bien que beaucoup se battaient pour que le pouvoir soit au peuple, le peuple avait toujours besoin d'un dirigeant. Un pays était une jungle sauvage qui avait un roi des animaux. Un roi pas trop fainéant pour faire régner sa loi. Malheureusement, cette fois si, après les juifs et les homosexuels, le doigt c'était pointé sur des Wilds. On avait beau jouer les indignés, c'était à prévoir. Tandis qu'elle usait d'une mauvaise foi probablement hallucinante tout en conversant avec elle-même, sa pupille aperçu du coin de l'oeil les cheveux rédiger tout un roman sur l'espèce de cahier. Les mains occupées à pendre dans le vide, son oeil d'olive observait les notes pour tenter de les déchiffrer. Ciel, que c'était laborieux et entortillé. Lâchant un soupire narquois, mam'zelle leva les yeux - elle détestait lever le syeux- vers le jeune homme qui avait l'incorrection totale d'être plus grand qu'elle.

Un peu assommée par le débit de paroles du géant vert, Nova se laissait faire docilement - ou presque. Que c'était généreux de la part du travesti de faire preuve de savoir-vivre en faisant semblant de s'intéresser à sa soudaine mutation en éléphant girl. Question de politesse. L'écrivaine adorait appliquer ledit savoir-vivre sur les sujets qui fâchaient ou gênaient. Maintenant, est-ce que lui répondre servait vraiment à quelque chose ? User sa salive tout en sachant pertinemment que la réponse entrera par une oreille et ressortira par l'autre. Elle réfléchira à coincer la réponse dans une de ses prochaines répliques, qui passera, bien évidemment inaperçue. Jetant un coup d'oeil plus que hautain vers le script et son titre, elle haussa les épaules dans un geste irrévérencieux et d'un dédain plus qu'ostensible, avant de ramener ses doigts vers une mèche rebelle venant lui chatouiller le nez.

- Je pense que je veux rester ici. A moins que ma présence ne distraie ton esprit créatif.

Et là, the carnet vole à travers la pièce pour aller rejoindre ses confrères communément appelés feuilles de papier. C'était comme si cette lamentablement petite chose, qui contenait tout ce qu'un couturier devait savoir sur son client, n'était là que pour donner l'illusion d'un travail fait dans les règles de l'art. Or, l'illusion venait tout juste de se briser avec ce geste un poil cavalier. Nova cligna des yeux, parfaite incarnation de l'ahuri qu'elle se sentait parfois obligée d'être, quand elle oubliait d'être odieusement arrogante. Une fois la crise cardiaque passée - ça devrait être interdit de faire peur comme ça, merde - la demoiselle daigna exécuter la demande de la vendeuse sans même se questionner sur le futur tragique de son colier pour chien, autrement dit : collar. Dans un mouvement qui se voulait gracieux. Tendant le bras loin devant, elle tenait le colier du bout des doigts en le laissant penfouiller de toute sa longuer, qui en disait long sur le diamètre de son cou. Un léger sourire, pour une fois sincère, flottait sur ses lèvres sanguinaires tandis qu'une lueur ne pouvait s'empêcher de briller dans ses yeux verts. C'était le genre d'étincelle qui prenait place dans le fonde chaque pupille dont le maître confiait son sien à quelqu'un qu'il ne connaissait pas. Rien de bien méchant, juste par mesure de précaution. Donc, ses yeux étaient en train de dire quelque chose dans le genre : "tu ne me le rends pas en un morceaux, je te plante une fourchette dans le dos"

- Te presse pas, je n'ai rien à faire de toute façon.

Elle prit le temps de prononcer cette phrase d'un ton calme et posé, pointillé par quelques notes d'amusement et de narcissisme, rien que pour se faire plaisir. Les yeux doucement plissés pour éviter de se cramer les yeux par les néons du plafond, sa majesté se retourna et posa ses fesses royales sur le comptoir, juste à côté du bouquin comme si c'était le seul endroit de la boutique assez digne - pour ne pas dire résistant - pour la porter. S'assied n'aurait pas été le bon mot, non, elle s'était plutôt avachie sur son autel. Donc, 'avachie' sur le comptoir, elle regarda les tentacules redevenir de presque simples cheveux, s'écoulant le long du dos de leur propriétaire.

- Et oui, je suis dans le monde de la littérature. D'ailleurs, les affaires marchent bien ?

Bon, elle devait supposer que oui vu que la boutique était toujours ouverte, mais sa question allait un peu plus. Parce qu'il y avait plusieurs niveaux de " bien". Celui qui disait "j'arrive à boucler mes fins de moi" et celui qui était plus optimiste "Si l'envie de travailler me prends, je m'assieds et ça passe"
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeLun 31 Mar - 12:58

Sourire aussi léger qu’un poil sur une soupe, épinglé niaisement sur son visage d’albâtre et figé. Niais, mais pas con(ne) bête.

.Pause.


A peine détraqué, commun, comme celui de l’imbécile heureux, avec un courant d’air omniprésent dans le cerveau. Vfiuuuuuuuuu. Un rictus sans aucune animosité particulière, type Teletubbies détraqué, qui dévoile la point acérée de ses canines immaculées, mais point aussi tranchantes que celles d'un fauve, ainsi que la langue noire qui serpente entre, aussi agile que si c’était une extension tentaculaire placée spécialement à cet endroit par Dieu. Ah Dieu, de quoi se poser de grandes questions rhétoriques sur sa présence, bien qu’il n’y ait pas même l’ombre d’une croix au cou blême du Chapelier Fou, ou même ailleurs. Lorsque l’on a décidé de créer sa propre religion [CF "L'oktopokisme"], prendre en compte celle des autres reste de mauvais goût. Bouddhisme, shintoïsme, animistes, catholique, hindouiste, satanisme… Tout cela le laissait de marbre ; à visage d’albâtre, comportement de statue de sable, dont les expressions changent à chaque courant d’air, le vent pouvant être pour l’occasion les sentiments. Enfin, on peut nommer de cette façon les simulacres de sentiments qui agitent les traits mobiles du Chapelier Fou. Ah, faut être triste ? Okay, pleurons. Et que je te sniffouille dessus. Facile d'imaginer un tel comportement, sans être pris en dérision. Le visage du Chapelier Fou est aussi malléable que celui d’une Bratz.

Le poignet, souple, s’enroule autour de la nuque frêle, tandis que les pieds de Princesse Tutu s’envolent vers d’autres horizons. La boutique, petite, se transforme peu à peu en jungle impénétrable, remplie de marais-tissus et d’avalanches de soie. Le moindre écho de voix pouvait vous engloutir sous du velours, et causer votre étouffement par le resserrement soyeux des boas-moumoutes. L’imagination du Chapelier Fou fait vivre le commerce, à travers les particules de poussière qui volètent joyeusement à la faible lueur que dégage le soleil hors p’tit monde. Un micro-organisme d’acariens. Le bal des microbes.
Le paysage accidenté défile sous les yeux clairs, mobiles dans les orbites ; lin damassé à l’est, molleton noir à l’Ouest, la tulle au Sud et au Noir le Soie, avec le velours. A grands coups de coude volubiles, le travesti se creuse un chemin dans les étagères. Il parvient enfin à dégotter quelques mètres de soie vermeille, ainsi qu’un large bandeau noir de velours. Les idées se précisent. Ting ! En fermant ses paupières, cerclées de fines veinules bleues, elle voit la robe. Tout à fait dans le style grand couturier. La demoiselle de Trèfle sera décemment habillée pour aller danser, ou écrire, au choix, bien que la note risque d’être salée…


« Hu. Remerciements. »

Elle revient vers son comptoir, le tissu coincé sous ses bras. Son panier, au rythme de hoola hop de ses hanches, se tord, frétille, hurle, mais ne se déchire pas, valsant aimablement, à grands renforts de froissements. Morgan(e) recueille avec sérieux le collier noir, avant de le poser à côté de la cliente, qui s’est installée d’elle-même avec son bouquin. Tout ce qui fait parti de quelque chose va dans un endroit semblable à ce quelque chose. Vieille idole sortie du fond de la boutique-jungle.

Elle se munit d’une paire aiguisée de ciseaux, et les affûte contre le bord terne du comptoir. Le bois a fait son temps, éraflé par les coups de lames. Enfin, le travesti y a tout de même fait ses plus belles créations ! N’oublions pas que le bois aussi a une âme, tout usé qu’il soit, certes !


« Vous avez sorti de grandes choses de votre tête ? »

Cette fois-ci, la question n’est pas dénuée d’attentions. Il/Elle pince les lèvres, découpant soigneusement une longueur de trois mètres dans la soie. C’est beau, et ça sent bon, le tissu qui n’a pas été remué depuis trois plombes, le soleil qui s’est imprimé dessus. Loin d’être glauque en tout cas.

« Fufufu, tout se passe plutôt bien. Les clients coulent à foison, commandent sans même y songer. Leurs pensées dépassent leurs gestes. Et nous ne cessons d’inventer de nouvelles choses. Vous, comme vous travaillez dans l’écriture, vous sortez des mots. Nous, nous sortons des vêtements. La Boîte de Pandore du Chapelier Fou. »

Effectivement, la boîte de Pandore qui laisse échapper un nombre incalculable d’idées au compte-goutte ou cash. Tu veux de l’idée, en voilà !
Loin d’elle la pensée de faire du SM, mais il songea affectueusement à la chaîne, qu’il s’occupera de placer sur la robe pour… Eho, c’est secret de fabrication pour l’instant !
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeLun 31 Mar - 19:33

Appuyée d’un bras contre le comptoir, obligeamment tourné vers le garçon qui venait de s’octroyer le droit de mutisme, Nova tapotait un rythme irrégulier sur l’une de ses trois addictions. La littérature, l’alcool et la caféine. La première provoquait toujours en elle une décharge aussi incontrôlable que délicieuse, et elle ne tenait pas vraiment la deuxième. Pas au point de rouler sous la table au bout de deux verre bien sûr, mais le fait était qu'elle consommait par périodes et n'y était donc pas accoutumé. Elle passait parfois quatre mois sans avaler une seule goutte d'alcool pour se retrouver un beau soir, sans vraiment savoir comment, devant le fait accompli, à savoir plusieurs cadavres de bouteilles dont elle se savait être l'ardent meurtrier, et l'envie irrépressible d'aller rendre par un orifice peu adapté à l'usage son dernier repas baignant dans un mélange de spiritueux plus que douteux. Généralement la moquette se voyait être un parfait réceptacle. Le pire de tout ça était sans doutes qu’elle n’aimait pas l’alcool, ni même l’effet de chaleur qui s’en suivait chez elle. Mais ça lui donnait l'impression d'avoir le choix, de ne pas obéir à ses papilles, de ne pas se torcher la gueule par manque de volonté mais par une décision de sa part tout à fait volontaire, à défaut d'être réfléchie ou justifiée. De la mauvaise foi à l'état pur. Mais l’addiction était quelque chose d’effrayant. Nova pouvait apercevoir du coin de l’œil ce que tout alcoolique -même en rémission- était capable d'apercevoir à 15km de distance, dans le noir, caché derrière un mur en béton armé et de dos. De l’alcool quoi. Et là, l’imagination entrait en action pour donner quelque chose d’encore plus effrayant. Nova était capable de faire ce qu’un alcoolique au dernier degré ne pouvait pas : entrer, l'espace de quelques secondes, en communication mentale, genre rencontre du troisième type, avec une bouteille d’alcool.

"Dis-moi ma jolie, quel est ton nom ?
- Viens le lire par toi-même ... (elle avait une voix sucrée, légèrement piquante ... un champagnisé ?)
- Hélas, je crains que tout cela manque de sérieux, belle enfant.
- Au diable la retenue !"


Laissant son bras glisser un peu plus loin sur le comptoir, s’avachissant sensiblement, elle leva les yeux vers la vendeuse. Relevant le menton, un demi sourire hésitant entre la satisfaction la plus primaire et la prise de conscience subite du ridicule de ses pensées. La boutique se transformait en quelque chose qui lui rappelait vaguement le Moulin Rouge juste avant un spectacle le stresse et la panique en moins. Les couleurs et les tissus volaient dans tous les sens à part que dans un cabaret un morceau de tissus ne dépassait pas les 3cm². Désert de tissus multicolores sur lesquels galopait une ombre rougeâtre. Son regard vert trottait sur les murs jusqu'à atteindre le fin faisceau de lumière qui rentrait par la fenêtre. Des particules de poussière flottaient dans l'air, illuminés par les rayons d'un soleil plutôt frileux. On aurait dit des étoiles. Éphémères, les étoiles s'éteignaient une fois avoir atteint l'ombre. Penchant la tête sur le côté, l’écrivaine observa cette microflore. Si quelqu’un donnerait un coup sur les draps les étoiles s'envoleraient à nouveau et le paysage changera, ressemblant plus aux falaises d'Etretat. Dieu devait pouvoir changer le monde avec autant de facilités. Un coup de main et Pouf, plus rien. Et voilà que la blondinette se prenait pour le tout puissant. Mhhh, plus facile à détruire qu'à construire.

- Grandes choses ? Non, je ne pense pas. Les grands hommes, les génies, les saints, n'ont fait de grandes choses que parce qu'ils étaient inspirés par un grand idéal. Et moi, d’idéal, je n’en ai pas.

Si au moins l’un de ses livres avait réussi à changer la vie de quelque quelqu’un, alors oui, elle avait fait de grandes choses. La période où ses thrillers tuaient des gens était à rayer de la carte. Pas parce que ça avait un aspect immoral, juste que ça n’avait rien avoir avec un livre spirituel qui redonnait espoir ou qui rendait X heureux. L’art de l’écrivain consistait surtout à faire oublier qu’il employait des mots. Prendre le contrôle du corps du lecteur. Si on ne faisait pas dans l’érotique, c’était extrêmement difficile à faire. Enfin, dire qu’elle avait fait quelque chose de grand était un sérieux manque de modestie. Et c’était sans doutes la seule chose qui faisait entrave à son arrogance et son narcissisme. L’homme pieuvre s’était matérialisé juste à côté d’elle, coupant des pans de tissus vieux comme le monde. Mais c’était dans les vieilles marmites qu’on faisait cuire les meilleures soupes. Cherchez qui est la soupe et la marmite. Emplissant ses poumons de cet air lugubre faisant penser à une bibliothèque du troisième âge, elle ferma les yeux pendant quelques secondes. L’odeur s’alliait parfaitement avec l’image des tissus éparpillés dans la pièce. Devant elle, un tableau de Van Gogh. Contraste de la chaleur abricot avec une ombre violine, lourde, comme orageuse. Triste et doux à la fois.

Le sourire aux lèvres, elle écoutait le monologue du travesti tout en ayant l’impression de n’en comprendre aucun mot, comme si tout d’un coup, elle parlait un autre langage que seul les meubles et lampadaires comprenaient. Et puis il y avait cet espèce de « fu,fu,fu » en chaque début de phrase qui rendait ce personnage d’autant plus sibyllin et espiègle. Simple tic linguistique.

- Magnifique alors. A part qu’un seul mot peut détruire l’œuvre d’une vie, élever la fierté d’un peuple. Enfin, on peut très bien dire que tu crées des rêves, non des vêtements. Bien que, j’en sois sûre, tu travailles avec toute ton âme pour exécuter tes créations, ça reste quand même quelque chose de superficiel aux yeux des autres. Ce n’est pas un poil gênant ?

Beuh, c’est vrai quoi. Adressant un sourcille interrogateur au dit Chapelier Fou, Nova se redressa souplement sur le comptoir pour avoir une meilleure vue panoramique de ce qui allait devenir sa robe de gala, soirée, sortie etc., etc. Elle n’en attendait pas moins d’un couturier qui faisait les vêtements sur place avec une rapidité abracadabrante. C’était à en douter de la qualité du produit. Scrutateur, son regard détaillant le travesti de haut en bas comme s'il passait un casting quelconque pour devenir la nouvelle star du dimanche, avec sa majesté Nova dans le rôle du jury sadique, sans pitié, et surtout vachement superficiel. Elle le fixait en silence. C'était quelque chose qu'elle pouvait faire durant des heures. Observer le monde autour d’elle, les gens, leurs démarches, leurs expressions si changeantes. Se planter au milieu de la foule et se laisser porter par celle-ci. Poser son regard neutre sur les choses et les laisser se juger par elles-mêmes.
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeMar 1 Avr - 11:12

Les humains ne sont pas de grands juges. Ils ne savent pas écouter, ou même parler ensemble sans se taper dessus, c'est la loi du plus fort. Celle de la jungle guerrière, aussi sûre que celle de la guérilla. Descendre le plus vite l'ennemi avec tout ce qu'on trouve, que ce soit un mot blessant ou le cuir de son porte jarretelle. Alea jacta est.

Quand à faire la paix, lorsqu'ils passent dans la boutique de Morgan(e), ils n'y pensent même pas. Ils peuvent se payer des fringues à 400000000 de francs, la terre n'arrête pas de tourner. C'est un fait indéniable, et pourtant étrangement troublant. Même cette petite boutique que la travesti s'acharne à faire vivre avec le pouvoir de l'amour et de l'imagination, n'est rien face à l'immensité de la planète Terre. Un avocat ne pourrait pas juger ses vêtements, un psychologue encore moins. Oui, tout repose sur un flou artistique, et vague. Mais il y a de quoi s'en sentir flatté(e), d'être le seul être, peut-être, dans Paris, à savoir si efficacement vider la tête des clients, à leur mettre du caca dans les yeux, à leur rendre un peu d'enfance. Passer la porte de l'Oktopoco Fly, c'est rentrer dans le miroir d'Alice. Aucune règle, autre que celle de Morgan(e). Ne pas piétiner les tissus comme un buffle. Ne pas griffer les murs. Ne pas discuter sur les prix. Ne pas hurler, ça effraie le poisson rouge. Il y a une certaine fierté à avoir lorsqu’on songe que l'on fabrique de ses propres mains autre chose qu'un cauchemar, parfait paradoxe des mots de la jeune femme. Si encore le travesti était moche, et que ses fringues n'en valaient pas la peine, il aurait pu être malheureux. Mais la vie souriait à son compte en banque, les clients lui donnaient ce qu'ils avaient de moins cher et en trop grande quantité. Le gaspillage n’a pas de prix lorsque l’on s’est enrichi avec la guerre. C’est dans ces cas-là que le trafic d’armes, c’est classe. Mais l'argent, c'est si volatile aussi.

Maintenant, l'un des fantasmes du couturier serait de fabriquer une immense robe en billets verts, attachés les uns aux autres par des pièces de dix centimes, ou de un franc. Chacun des pas du mannequin provoquerait dans la robe un cliquetis à faire jouir un milliardaire. Le son harmonieux des pièces qui s'entrechoquent entre elles, le froissement soyeux des billets de 5000. On pourrait repérer à l'oreille l'origine d'une pièce, ou même sa valeur. Un "Ting" aïgue pour cinquante centimes, un grave pour un franc. Un concerto pour argent, assemblé sur le même corps.
Enfin, à tant fantasmer sur une chose encore impossible [trouver un client milliardaire], il est clair qu'on ne peut que plus avoir du mal à juger le reste. Cependant, qui autre qu'un styliste peut mieux noter l'oeuvre d'un de ses congénères ? Hors, le couturier est souvent jaloux de ce qui surpasse ses créations et le client ne sait pas voir ce qui est réellement beau, souvent aveugle aux choses importantes. Des deux partis, ce sont des commentaires hypocrites et superficiels, vagues comme un château de sable qui s'écroule sur la plage. C'est pourquoi Morgan(e) ne s'en soucie pas de tout cela, il survit de son propre regard sur ses oeuvres, et tant pis à ceux qui n'aiment pas. Certains quittent la maison familiale à trente ans, et lui, vit encore au milieu de ses tissus comme un ermite retiré de la vie civile. De toute façon, vu la façon de laquelle il est vêtu, cela lui permet tout juste d'aller faire ses courses au coin de la rue sans se faire siffler par des petites frappes. En même temps, c'est pas plus mal. Pourquoi vivre au milieu de la société humaine, lorsque l'on a sa propre Ibiza dans sa boutique, son paradis artificiel ? Et puis, seul l'argent compte pour lui. C'est beau une pièce d'un franc...
Pourquoi est-ce que c'est important à ce point d'amasser des millions de francs sur son compte surbooké ? Il ne le sait pas lui-même. Pour construire un château en Espagne ? Se payer un baignoire en grenat ? Un poisson rouge aux uraniums ?


" L'idéal n'est pas ce qu'il y a de plus important dans une création, fufu. C'est avant tout le talent qui compte, vous ne croyez pas ma Demoiselle de Trèfle ? Il est vrai que l'idéal, le but doit être présent, mais, avec du talent on réussit tout ce que l'on veut, shuhuhu. "

Elle joignit soigneusement, à même le sol, le tissu en une espèce de buste à peine défini, le temps de retourner à son comptoir. Il cherchait... quelque chose, sans vouloir attirer le regard vide de la jeune femme. La couture était quelque chose d'essentiel de sa vie, une activité aussi naturelle que la respiration. Pique. Inspire. Couds. Expire. Coupe. Inspire. Brode. Expire. Il n'y pensait même presque plus. Ses mains pâles étaient devenues des tentacules noueuses, qui ne s'occupaient plus de son avis, autrement que par ses extensions nerveuses. Une idée naissait dans son cerveau, descendait sa colonne vertébrale et suivait le chemin habituel, tout son corpe était ainsi mis au courant de ses projets familiaux. Le corps est sa famille. Les bras, ses parents. Les pieds, ses frères et soeurs. Et le reste... ben... le reste !

" Gênant ? Nous ne pouvons pas comprendre le sens de ce mot. Tant que nous faisons ce que qui nous plaît à nous, le reste nous convient. Je pourrai vendre des cauchemars, ou des rêves, notre métier nous plaît fufu. Et advienne que pourra. Nous exhibons ce qui nous sort de la boîte de Pandore, mais en quoi devrions-nous être gênés ? Et vous, vous avez choisi de coller des mots à la suite les uns des autres, c'est encore plus personnel que la couture, fufufu. Vous vendez pour que des milliers d'yeux lisent vos mots, vous ne les connaissez pas, mais vous dilapidez votre patrimoine en armes, quelle que soit l'utilisation que vous en faites. Huhuhu. "

Il se trouvait bavard pour une fois, et ses paroles pleines de futilité. Y'avait-il quelque chose à comprendre, à voir, à saisir chez cette femme pâle ? Un rayon de soleil jouait dans ses cheveux pâles, et elle arborait l'air sarcastique d'un juge face à un pédophile, à hésiter sur l'honnêteté de ses paroles. Un juge au barreau qui ne lui laissait qu'un seul avocat pour sa défense : elle-même. A voir ainsi son expression, tandis qu'il fouillait dans un tiroir du comptoir, Morgan(e) comprit que la Demoiselle de Trèfle n'avait que des intérêts de fauve. Reste à savoir dans quelle domaine. Mais comme celle-ci l'avait dit, elle avait le temps. Il avait toujours le temps. Dans le miroir de l'Alice, il n'y a plus que des jours. Lewis Carol a pondu un bon truc là...
Le travesti parvint enfin à dégoter deux chaînes à petits maillons. Avant de commencer quelque chose, elle prenait toujours infiniment de temps à trouver les matériaux. Pour la robe, il lui manquait encore :

- Soie Vermeille
- Velours Noir
- Scie à métaux
- Chaînettes à petits maillons
- Plumes noires
- ... Et tout le tsouintsouin habituel

A part cette discussion quelque peu sérieuse, qui soulevait pas mal de questions sur sa philosophie intérieure de couturier, la manoeuvre à faire ne déviait pas du commun. Blablatage joyeux avec une cliente pâle comme un bloc de marbre tandis que ses mains s'affairaient sur la future oeuvre, au contact si soyeux. Ces moments où l'âme du Chapelier Fou quittait son corps pour rejoindre ses ciseaux. Elle s'incarnait dans les lames argentées, comme si toute sa vie durant, elle avait été ce outil à la fois si meurtrier et si utile. "J'ai dû être des ciseaux dans une vie antérieure."
Bref, quelque chose de bien beau naissait entre ses doigts, sans pousser le premier cri digne des nouveaux-nés.
Fufufu…
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeMer 2 Avr - 0:45

Les noeils pétillants d'intelligence, sa majesté observait du haut de son trône, qui avait l'incorrection totale d'être inconfortable, la chose aux apparences perfides se mouvoir devant elle avec autant de facilité et de grâce qu'un papillon. Un travesti. Pfff. C'était une preuve sur pattes du fait que les hommes qui voulaient devenir femmes étaient beaucoup plus efféminés que les femmes elles-mêmes. La gente féminine avait besoin des yeux des hommes pour continuer à fleurir alors que les travesti avaient besoin des yeux des femmes -beaucoup plus portées vers la critique que n'importe quel œil- pour se faire accepter. Etait-ce parce que les hommes étaient d'éternels insatisfaits qu'ils en venaient à se travestir ? Jamais rassasiés : « quand une fille leur plaisait, ils voulaient en tomber amoureux ; quand ils étaient amoureux, ils voulaient l'embrasser ; quand ils l'avaient embrassée, ils voulaient coucher avec elle ; quand ils ont couché avec elle, ils voulaient vivre dans un avec elle dans un meublé ; quand ils vivaient avec elle dans un meublé, ils voulaient l'épouser ; quand ils l'avaient épousée, ils rencontraient une autre fille qui leur plaisait » (Frédéric Beigbeder). L'homme était un animal insatisfait qui hésitait entre plusieurs frustrations. Si les femmes voulaient jouer finement, elles se refuseraient à eux pour qu'ils leurs courent après toute leur vie. Un travesti. Ca lui faisait penser à une rubrique écrite en 1966, c'est-à-dire, il y avait environ 2 an, dans un journal dédié aux médecins généralistes. Une toute petite rubrique qui expliquait pourquoi les homosexuels étaient homosexuels. Comme si ce genre de choses pouvait s'expliquer de façon scientifique. Alors là, on pouvait entendre de tout :
« Par ailleurs, dans les écrits de Freud, l'homosexualité est considérée comme une pathologie. La psychiatrie n'a pas pour autant changé ses méthodes, simplement les psychiatres considèrent la chose différemment. »
Pour certains donc, l'homosexualité, la bisexualité et le travestissement étant quelque chose de transmissible génétiquement. Original, mais encore mieux :
« Certains scientifiques ont trouvé des anomalies biologiques pouvant expliquer l'origine de l'homosexualité. En 1991, la plupart des hypothèses Dr Simon LeVay, neurobiologiste américain, publiait une étude mettant en évidence une particularité anatomique dans le cerveau d'homosexuels masculins. Par ailleurs, en 1993, le Dr Dean Hamer, généticien américain rapportait l'identification sur le chromosome sexuel hmère, d'une zone nommée Xq28, pouvant être à l'origine de l'homosexualité hérité de la masculine. » Une anomalie génétique. Carrément. Ben voyons.

Elle pouvait citer ces textes sans problème. C'était le genre de trucs qu'on n'oubliait pas tant c'était ridicule à entendre. Mais ce n'était pas le genre de débilités qu'on apprenait par coeur pour la réciter par coeur devant ses potes. C'était préférable de garder ça pour soi, et de rire malicieusement, assis sur le canapé en poil de lama à poils, en se reflétant dans la télévision éteinte. Sortant de son rêve, elle scanna la pièce du regard histoire de voir si rien n'avait changé pendant son long coma éthylique. Le sujet principal de sa longue discussion était en train de se dandiner juste à côté d'elle, le visage un peu au dessus des tiroirs. A ce stade là, ça ressemblait presque à de la soumission. Il lui avait d'ailleurs dit quelque chose, non ? Comme quoi, sa majesté avait beau prétendre écouter les gens, il lui arrivait de dévier du droit chemin pour tomber dans le gouffre. Pas qu'elle éprouvait le besoin de respecter ses valeurs et convictions -si seulement elle en avait- c'était juste une affaire de classe, et un peu de "tout le monde aime avoir de l'attention" aussi.

Au premier rang pour observer son magnifique jeune homme efféminé, elle sentait une espèce de proximité entre eux en cet instant, c'était comme si subitement, la vendeuse passait d'une figure impersonnelle d'autorité à -mon dieu, mais oui- presque un être humain, vaguement hésitant sur la conduite à tenir. Il avait beaucoup moins l'air d'un iceberg vu de près, mais en même temps, vu les animaux de foire qui faisaient leur nid sans sa boutique, c'était compréhensible, c'était même à se demander comment il pouvait rester aussi calme. Nova aurait déjà rétabli les châtiments corporels, voir même les tortures moyenâgeuses et la peine de mort. Bref, c'était quoi qu'il lui avait déjà dit ?

- La chance d'avoir du talent ne suffit pas ; il faut encore savoir s'en servir. Le talent n'a de valeur que parce que le monde est enfantin. Si le public avait la tête assez forte, il se contenterait de la vérité.

Et de toute façon le talent ne vivait pas sans l'intelligence et la chance. Et puis c'était ainsi. Les choses prenaient plus ou moins d'importance selon ce qu'en décidait le flux impétueux de la vie. Ouah, âme de poète. Bref. Il en était que, plein de petite choses, dont on en avait généralement rien à branler, influaient sur la vie de tous les jours jusqu'à devenir la mentalité de demain. C'était un peu comme quand on se retrouvait devant la chose la plus ridicule et inutile qui soit : 1centime de franc, de livre, de mark, bref, un centime quoi. A force de mettre de côté cette chose incroyablement ridicule, vous vous rendez compte qu'une fois le tout déballé, ça faisait énorme. En plus de briller au soleil, ça donnait 1franc ( ou livre, ou mark ou ...bon, t'as compris) ! Les insectes, eux aussi, avaient beau être des trucs pitoyablement petits, ils faisaient flipper la femme au foyer et les ménagères du samedi/dimanche quand ils s'y mettaient à plusieurs. Quoi que il était nécessaire de savoir que l'humain ( tout ce qui se situant entre le citron, le coing la banane, le membrillo (viril) et la baleine à bosses ) pouvait se faire tuer par beaucoup plus petit que soi. Donc l'essentiel de toute cette petite histoire était de démontrer que les petites choses avaient beaucoup de valeur quand elles étaient rassemblées.

- Il ne faut pas croire que quand un écrivain écrit, il y a va avec toute ses tripes. Avec la dictature maquillée en république qui règne, on est dressées à nous énerver sur commande. Il s'en va de soi que 'énerver' est un mot interchangeable, tout dépend du contexte. Et puis les mots...

Elle s'arrêta un instant, laissant la phrase en suspend comme une héroïne, stéréotype même d'un film à l'eau de rose où la nana disait un truc dans le genre : " je... je crois que je...t'aime (te déteste et tu es une grosse merde qui ne sert à rien)". Les yeux quelque peu brumeux, Nova envisageait mentalement mille tortures à faire subir aux réalisateurs de ce genre de cinéma pour avoir osé mettre sur écran une telle horreur. Et après ça s'étonnait que les femmes cherchaient l'homme parfait... Observant attentivement le travesti, elle constata avec quel intérêt il faisait son métier. C'était beau à voir les gens pour qui le travail était un loisir et non un ennui perpétuel. Pendant les six premiers mois de travail, Nova était assise devant un bureau qui faisait plus penser à une table basse qu'à autre chose à regarder le plafond en pensant à des images pornographiques trop compliqués à transcrire ici. A ce moment précis de l'époque elle a dû voir plus de culs que la cuvette es chiottes. C'était la loose totale. La pieuvre était littéralement en train de papillonner -image très paradoxale- dans son petit monde où les tissus en coton dansaient la lambda, la soie faisait la danse du ventre, le synthétique lançait des aiguilles, des boutons et des ciseaux dans les airs tandis que la fourrure s'inclinait devant leur maître incontesté du stylisme. Bon, elle avait oublié le mètre mesurer qui devait servir de chien de garde pour le couvercle de la boîte de Pandore, surveillant vaillamment l'entrée en étranglant les gens qui forçaient trop tandis que le travesti construisait son palais royal fait d'aiguilles et de boutons de manchette en or massif. Fallait peut-être arrêter avec l'alcool... Quoi que ça devait lui être arrivé au moins une fois, comme à toute personne un minimum passionnée. Oui, avec cette pensée Nova avouait avoir imaginé un monde fait en 'bip' et en 'bip' avec plein de 'bip,'bip'bip'. Top secret.

- Les mots ne sont que des mots, et je n'ai jamais ouïe dire que dans un coeur meurtri on pénétrât par l'oreille.

[William Shakespeare]
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeJeu 3 Avr - 13:54

Parti(e) vers d’autres sphères de pensées, bien trop éloignées et personnelles pour être racontées au lecteur concis, voyeur; Morgan(e) voyageait tranquillement dans sa boutique, à la manière d’un TGV : fluide et pratique. Son mode de réflexion restait son moyen de transport le plus rapide et ses pieds, légers, n’étaient là, au final, que pour faire joli. Les rangers montantes passablement usées lui serraient agréablement les mollets, le cuir lustré par le temps frottait contre ses genoux à chacun de ses mouvements, râpeux.

Non, une fois lâché(e), c’était un autre cerveau, plus instrumentalisé que le premier, qui prenait la place de celui rempli d’éther. Docteur Jekyll et Mister Hide ? Presque, en moins dangereux. Elle brandissait vaillamment ses ciseaux, comme s’il s’apprêtait à aller poignarder un croque mitaine de foire, et entreprit, avec froideur, de scier les petites chaînettes en plusieurs morceaux de différentes tailles, de manière à pouvoir les rassembler entre elles dés que le besoin s’en ferait sentir.

Un petit anneau reste ouvert, aussi profond qu’un trou noir. Morgan(e) essayerait d’y passer un doigt, qu’il n’y arriverait pas. Les maillons sont petits, argentés et légers. Le travesti songea vaguement à l’endroit où il devait l’avoir acquise, encore en entier. Un moment déjà, il devait l’avoir récupérée à la Bastille, sans faire exprès. On ne vole jamais consciemment, quand ce n’est pas une manie. Sans le vouloir, sa main avait glissée sur le cou d’une femme ; on est maladroit lorsqu’on est fatigué, arrachant la petite chaînette. Il avait du la fourguer sans y penser dans sa poche et voilà le travail ! Pas de quoi être fier honnêtement, mais au moins, cela allait enfin servir, après des années à prendre la poussière dans un tiroir fermé. Quand à songer à tout ce qui était en sa compagnie durant ces quelques « instants de solitude », à savoir divers choses inutiles, il y avait de quoi prendre peur. Un vrai bouillon de culture. Pour un asthmatique, entrer dans l’Oktopoco Fly serait malheureusement l’assurance d’une mort certaine. Il entrerait, respirerait un grand coup de l’air chargé de poussière, puis se mettrait à cracher ses poumons. Lorsque les secours arriveraient, il aurait déjà cinq centimètres d’acariens tapissant sa gorge. Plus discret qu’un pic à glace.

L’être androgyne secoua pensivement la bande de tissu qu’il avait découpée, éjectant des dizaines, ou des millions, de pensionnaires qui devaient loger entre les plis. Il préférait clairement travailler dans le calme et sans personne pour l’observer comme un touriste, mais le client était roi, quel qu’il soit. Tant qu’il paye, il sera toujours royalement servi, s'il venait à l'idée de la Demoiselle de Trèfle de commander un cocktail malibu cerise, il le lui apporterait sans tarder. Être serviable, c'est tout un métier...
Le travesti repoussa un tas de papiers de son plan de travail, avant d’étaler le tissu dessus. Il piqua une aiguille hors de ses mèches et tira de sa chevelure un long fil noir. Remarquant le nouveau décolleté de la robe qui partait en cacaouéte, il s’acharna à retourner le bord de quelques centimètres, pour le coudre au reste. Pour l’instant, l’œuvre n’en était qu’au stade embryonnaire, mais l’art ne saurait tarder arriver dans les différentes molécules du tissu, s’imprégnant de partout, poissant la robe d’une touche de magnificence, à travers les doigts agiles du couturier :


« Alors, dés qu’on sait se servir de son talent, tout est gagné Ma demoiselle de Trèfle ? Ou n’est-ce qu’un début ? Il faut aussi l’imagination, c’est important cela… Nous ne lisons pas beaucoup, ce n’est qu’une tâche insuffisante, mais les écrivains sont censés mettre du leur dans leurs livres. Du leur, ce n’est pas que des… tripes, des viscères ; c’est plutôt un morceau de l’âme. Tout à l’heure, vous avez parlé d’idéaux. Personne n’en a réellement, le peuple reste insatisfait tout le temps que dure sa vie et des véritables buts… c’est utopique fufufufu. »

Il trouvait cette femme étrangement agréable, avec cet air supérieur qu’elle se donnait. A la fois acide et touchant. Mais elle n’en restait pas moins extrêmement intelligente, cela se sentait dans ses mots, dans l’air qu’elle expirait. Dans ce monde clos où il vivait, Morgan(e) est le Dieu Tout Puissant, God, Got, Dio, Бог ; les clients qui entrent ne sont que de simples personnes en quête de fantaisie, de douceur et d’enfance. Et lui, se montre tel que le Créateur de la Terre aurait dû l’être : bienveillant envers ses créatures. Hors, il est vrai que rien n’est gratuit et que le travesti ne fait pas de miracles, ne marche pas sur l’eau, n’ouvre pas des mers en deux, mais il parvenait à donner des sourires, même aux plus renfrognés. Chacun cache un sourire au fond de soi. Et cette fille aussi, avec son expression si vague. Les écrivains doivent vivre sur une autre planète, à des décennies de celle des couturiers. Deux mondes différents qui se rencontrent enfin. A bien se souvenir, il n’avait jamais eu de clients écrivains. En général, les romanciers n’ont pas besoin d’être les mieux habillés. D’après les trèèèèès rares témoignages qu’il lui était arrivé de lire, le négligé était la tenue préférée de ceux qui restaient chez eux à longueur de journée. C’est triste pour eux de devoir s’habiller comme des sacs à patates. Mais c’est vrai que ce serait plus emmerdant d’avoir à s’habiller de façon sérieuse pour une soirée devant l’ordinateur.
Morgan(e) glissa le fil entre ses dents et le coupa sèchement, les yeux fixés sur la bordure qui se nouait entre ses doigts :


« Fufufufu, que voilà une belle citation ma jolie Demoiselle de Trèfle. »

Il se pencha sur le bustier, songeant déjà à une façon très grunge de lier une unie bretelle à la robe, de telle manière que la jeune femme ait l’air d’une Jane échappée d’un Disney. Hum, aurait-il dû dire kitch à cet instant ?
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MessageSujet: Re: Poisson et poison [Nova]   Poisson et poison [Nova] Icon_minitimeLun 7 Avr - 19:11

La poussière volait dans tous les sens donnant ainsi l'impression qu'un volcan avait explosé non loin d'ici, rependant ses petits cendres sur un pauvre ville sans défense. On pouvait voir les habitants, moustiques et compagnie, courir dans tous les sens, pour ne pas dire voler, sans savoir vraiment où aller. La panique, ça faisait peur. C'était surtout ce que provoquait ce sentiment qui faisait peur. Comme tout sentiment d'ailleurs. Tandis que Nova observait cette micro-flore avec son lot d'habitants affolés, le couturier s'acharnait sur le tissus tel le capitaine crochet, ou un autre personnage maléfique dans le genre, découpant ses pauvres victimes sans qu'un seul son plaintif n'en ressorte. Le criminel silencieux mettait ses victimes en lambeaux avant de les coudre les uns contre les autres comme Frankenstein, fabriquant une bête immonde. A part que là, rien avoir, c'était une création qui valait de l'or massif car faite à la main, ce qui impliquait également le fait que c'était une pièce unique. Souplement avachie sur son trône, sa majesté regardait un film. Généralement, elle observait les gens, leurs mimiques, les gestes, les mouvements des yeux, leurs moues, leurs poses, les frissonnements de la peau... Tout. Tout était bon pour être analysé, puis stocké au fin fond de sa mémoire, mais pas trop loin non plus. C'était un excellent moyen de savoir à qui on avait affaire. On avait beau savoir mentir, le corps était beaucoup plus bavard et judicieux que la bouche. N'importe qui pouvait être trahi par sa gestuelle. Quelle tristesse et quelle joie pour celui qui savait en tirer avantage. Mais aujourd'hui, elle était paresseuse et n'avait pas envie d'être responsable.

Le travesti s'activait sous le regard mi amusé, mi navré de Nova qui commençait à se demander si tout cela était réellement professionnel. Mais elle avouait tout votre honneur, elle aimait l'ordre, et plus encore le chaos. Les cendres continuaient à voler sous de fins faisceaux lumineux, déchantant quelque peu la jeune femme. Des étoiles comme s'il en pleuvait sur un fond multicolore un peu cartonné et élimé. C'était interminable. Surtout quand votre horloge interne faisait la grève et ne voulait pas marcher correctement. Elle en était à invoquer silencieusement la main bienfaitrice du temps lorsque des paroles d'une délicatesse époustouflante frôlèrent ses oreilles, la détournant de sa tâche ô combien spirituelle. Esquissant un sourire allant de paire avec son regard - navré - elle se leva, quittant le comptoir on ne peut plus inconfortable pour plonger son nez dans les premier rayon de vêtements venu. Voyons voir, fallait-il contredire son magnifique travesti ou le laisser dans la niaiserie la plus profonde. Même si Nova aimait contredire, elle évitait de débattre sur un sujet inconnu à moins d'être sûre que la personne en face d'elle était un trou du cul fini. Comme tout personne, son pouvoir de persuasions avait des limites devant un professionnel. Devant un amateur, c'était une autre histoire. Cependant, sa paresse était en train d'atteindre l'Everest et faire marcher ce qui lui servait de cerveau devenait alors un effort surhumain. Ca ne se voyait peut-être pas, mais il était extrêmement dur de débattre entre la paresse et l'envie de contredire.

- Ce n'est qu'un début, bien sûr. Et, ils sont censés, comme tu dis. Ne sois pas aussi naïf, un écrivain n'écrit pas dans un but purement passionnel. Et c'est bien dommage d'ailleurs. Si on mettait un peu de son âme pour écrire un livre, le stock serait très vite vidé. Non, ce n'est pas un morceau d'âme, c'est de la sincérité. L'imagination tout comme l'intelligence n'aide en rien à écrire de bons livres, elle peut cependant éviter d'en écrire de mauvais.

Les doigts plongées dans le multiples tissus, elle repensait à toutes ces choses qu'elle avait dû éditer, réécrire, corriger et lire. Le plus triste, c'est qu'il fallait autant de travail pour écrire un mauvais livre qu'un bon. Au début, elle écrivait pour le plaisir, mettant tout son côté passionnel et extraverti dans les mots et les phrases. Nova voulait donner un visage à ses obsessions, mettre de l'ordre, hurler en silence, parler sans être interrompue : c'était tout ça, écrire. Inspirer autrui, le pousser vers sa ressemblance, vers sa préférence. Elle écrivait pour soi, avant tout, car c'était la seule chance de faire beau. Et puis après, à partir du moment que l'écriture était devenu un métier, le robinet de l'inspiration c'était peu à peu fermé. Ecrire s'avérait être aussi compliqué que de coucher avec quelqu'un et que ça se passe bien pour les deux. Il lui venait quelques fois un dégoût en songeant à là quantité de débiles par lesquels elle risquait d'être lue. Elle s'était ruinée l'esprit à trop écrire, et l'avait rouillée à n'écrire pas. L'impression de n'avoir plus rien à dire y était pour quelque chose. Jamais les mots ne manquent aux idées, ce sont les idées qui manquent aux mots.

- Laissons les jolies choses aux hommes sans imagination.

Restée dans la légère alcôve créée par l'architecture hâtive et les teintures combinées, Nova s'étira avant de glisser ses doigts entre les tissus avec un plaisir bien peu dissimulé, et un léger frisson du au changement aussi subit que parfaitement agréable de température. Tournant légèrement la tête, la demoiselle esquissa un sourire torve en vers son travesti dont elle ne connaissait toujours pas le nom. Et puis, pourquoi le connaître de toute façon ? Nova ne demandait jamais le nom des gens qu'elle rencontrait. Ce n'était pas un principe ou une obligation idiote qu'elle s'imposait à elle-même, ni même une tradition familiale, ou une coutume locale, que de discuter parfois des heures avec des personnes charmantes sans même connaître ne serait-ce que son surnom. Nova devait le reconnaître, elle s'en tapait la plus part du temps. Et lorsque ce n'était pas le cas, elle n'y pensait pas, tout simplement.
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