Il est grand temps de rallumer les étoiles ... |
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| Un étranger pour la Résistance | |
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Evans Arydis Hannibal Leckter
Nombre de messages : 24 Race : Humain Emploi : Etudiant Date d'inscription : 05/10/2008
| Sujet: Un étranger pour la Résistance Mar 21 Oct - 23:20 | |
| La maison de presse Liberté ne connaissait pas l'habituelle frénésie qui s'emparait chaque jour des maisons de presse les plus prestigieuses. Les indics' ne s'amassaient pas aux portes, les camions ne faisaient pas d'éternels allers -retours entre les points de distributions . Quant aux imprimeries, elles ne vomissaient pas leurs papiers grisés dans une fureur démentielle. Dans le bâtiment, les journalistes ne se précipitaient pas dans toutes les directions, le téléphone ne sonnait pas toutes les deux secondes, le bruit des machines à écrire ne rendait pas fou, le sol n'était pas tapissé de brouillons ou de notes diverses et, enfin, surement le plus important, il n'y avait jamais de queue devant la machine à café.
A la place, on avait droit à une bâtisse plutôt commune, comme si elle voulait se faire discret par rapport à ses voisines. La maison de presse Liberté était tout ce qu'il y avait de plus classique. Elle se fondait…dans le décor. Quelques curieux s'arrêtaient de temps en temps devant pour observer cette maison d'édition pas comme les autres.. D'autres, plus vandales, préféraient uriner sur le mur ou graver des injures.
Evans Arydis contempla pendant plusieurs minutes le bâtiment. Aujourd'hui, il avait opté pour une tenue plutôt discrète. Un pantalon souple de couleur marron, une petite ceinture foncée, une chemise à petits carreaux noir et blanc et un demi-masque blanc, un peu terne.
Evans pénétra dedans. Une mince odeur de renfermée flottait dans l'air. A droite de lui, derrière un bureau en bois (ou un petit guichet, cela était assez ambigu), se tenait une vieille femme à la tête de vautour. Son physique lui donnait un air désagréable. Son nez crochu, ses yeux minces derrière une paire de lunettes dorées, sa bouche pincée, son visage ridé presque défiguré par la vieillesse. Elle était absorbée dans ses affaires et n'avait pas remarqué l'intrusion.
Evans s'approcha d'elle, cette dernière faisait semblant de ne pas l'avoir vu. L'étudiant se racla la gorge pour signaler sa présence. La vieille femme se décida se lever sa tête vers l'inconnu…lentement. Apparemment, elle n'aimait pas les visiteurs. Elle demandait d'une voix irritée: -C'est pour? -Bonjour, je suis Evans Arydis, j'ai un entretien avec Mr. Pierre Clastres. La dame se pencha sur un tiroir et sortit un agenda pour vérifier le rendez-vous. En vérité, elle ne faisait cela que pour la forme; elle attendait bien évidemment la venue du jeune homme. Au bout d'un moment, elle releva la tête et dit sur un ton toujours aussi désagréable: -Mr. Clastres est dans son bureau au troisième mais il est occupé. Vous devrez patienter un petit instant dans le couloir. Evans lâcha un petit "Merci" et se dirigea vers l'escalier. Le bâtiment était bien sur équipé d'un ascenseur mais Evans n'aimait pas les ascenseurs. Les ascenseurs étaient pour les faibles, les paresseux , les vieux et les estropiés. Il n'était ni faible, ni paresseux, ni vieux et avait toujours l'usage de ses jambes. Même si il avait dix étages à monter, il prendrait les escaliers. Prendre l'ascenseur serait sombrer dans la facilité. Et gagner quelques minutes ne signifiait rien pour lui.
De plus, ces escaliers n'étaient pas désagréables à monter. Les marches n'étaient ni trop espacées ni trop rapprochées et étaient en bon état. La rampe était aussi très agréable à tenir. Le long des murs, étaient accrochés des tableaux. La plupart étaient en fait, des photographies de personnes ou d'endroits qu'Evans ne connaissait pas. Il y avait aussi certaines couvertures de livres qui étaient exposées comme le célèbre "Le Meilleur des Mondes" d'Aldous Huxley.
Le troisième étage ne différait en rien des autres étages, si ce n'est que dans l'une de ses pièces, il y avait le bureau du leader de la Résistance. "Mon petit, va falloir que tu fasses gaffe avec lui. C'est pas un type commode. Je l'ai vu une fois et ca m'a suffit amplement. " lui avait-on expliqué. Evans fit quelques exercices de respiration pour évacuer la pression. Il n'avait pas peur. Certainement pas. Il ne craignait pas les inconnus, si terrifiant qu'ils puissent être. C'était une vague appréhension.
Le bureau était situé de l'autre côté du couloir mais Evans pouvait sentir l'aura puissante, autoritaire, violente qui en émanait. Un frisson glacé parcourait le corps du jeune homme. Il marchait lentement, d'un pas assuré dans un couloir à l'atmosphère feutré. De temps à autre, il pouvait déceler quelques bruits étouffés derrière les portes.
La porte du bureau de Mr. Clastres se dressait maintenant devant lui, identique aux autres portes présentes. Néanmoins, il y avait quand même un petit panneau doré collé dessus où était précisé: "Pierre Clastres. Directeur".
Evans s'assit sur une chaise en attendant qu'on vienne l'inviter à entrer. A cet instant précis, il faisait le vide dans son esprit. Il ne pensait plus à rien, de peur de tout oublier; comme les jours d'examen oral. Il avait préparé depuis un bon bout de temps cet entretien. Tout devait se dérouler sans embuches, sinon sa quête se terminerait là. Evans chassa rapidement cette éventualité de son esprit. Il devait entrer dans la Résistance. Pour sauver l'humanité des déchets génétiques de l'Allemagne nazie et dans une moindre mesure, la France. Pour honorer son père. Pour venger sa mère. Oui! Parce que la vie d'Evans Arydis était avant tout une terrible histoire de vengeance. Mais il n'aimait pas trop en parler.
Quelques exercices de relaxation le calma. Il avait simulé plusieurs fois l'entretien dans sa tête. Il s'était préparé à toutes les questions qu'on pourrait lui poser. Il était prêt.
En fait, il était presque prêt. Il s'était soudain souvenu d'un détail. D'un geste rapide, il retira son masque et le rangea dans son sac. Pierre Clastres ne tenait pas tellement les anglais en haute estime et il ne valait mieux pas réveiller les rancunes. Il ne voulait pas passer pour un "putain d'excentrique de bouffeur de gelée de merde". Sans son masque, Evans Arydis se sentait nu. L'air agressait ses joues. Tout le monde pouvait voir son expression faciale…et lire dans ses pensées.
Et il éclata de rire au plus profond de lui-même. Un rire dément. La folie s'était emparé de lui pour un court moment. Ses yeux s'élargirent. Son regard s'illumina, sa bouche s'entrouvrit et ses dents se montrèrent.
Maintenant il était prêt.
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| | | Pierre Clastres
Nombre de messages : 11 Age : 84 Race : Humain Parti : Résistance Emploi : PDG de LIBERTE, Maison d'édition / Chef de la Résistance Date d'inscription : 15/06/2008
| Sujet: Re: Un étranger pour la Résistance Ven 24 Oct - 18:13 | |
| « Voilà. La page intérieur doit être comme ça. Tu me refais ça tout de suite et tu y incorpores les images que tu as sur l’évènement. N’oublie pas les légendes que je t’ai fait parvenir et tu demandes à l’autre imbécile d’imprimeur de m’apporter tout ça quand ça sera fait. » Bruit d’un téléphone qui raccroche. Bruissement de papiers. Bruits de pas. Tout cela, tu l’entends de manière étouffée, au travers de la porte du bureau toujours close. Ce que le directeur de LIBERTE fait, tu n’en sais trop rien. Impossible de deviner qu’il était en train de s’allumer une pipe et qu’il ouvrait sa fenêtre pour laisser l’air dissiper l’odeur d’encre et de tabac. Impossible également de savoir pour toi qu’il avait à l’instant même pris le papier te concernant afin de relire une énième fois ton curriculum vitae d’un air pensif.
Bien sur, tu savais qu’il n’aimait pas les Anglais. Ce n’était un mystère pour personne. Cet homme là avait fait les deux guerres, et avait survécu. Il avait été victorieux, et subi la défaite. Il avait été marqué, et subi la trahison. Il avait vécu, et vivait toujours… avec tout cela dans la tête. Qu’est-ce que tout cela pouvait bien faire à un homme ? Comment pouvait-on vivre tout cela… comment vivre après tout cela ?
Un instant après, tu entends des bruits qui parcourent l’étage. Et par là même où tu es arrivé, tu vois débouler un petit homme binoclard et penché sur un portfolio laissant dépassé une bonne tripotée de paperasse. Tu pouvais apercevoir des croquis, des photographies, des immenses feuilles blanches mélangées à des manuscrits maltraités pleins de signes illisibles. Il passe devant toi sans te voir. Alors qu’il se rapproche, tu te rends compte qu’il n’est pas si vieux que cela. Devant sans doute aborder sa quarantième décennie, il était pourtant courbé comme un petit vieux. Et cette odeur qui arriva sans prévenir… Nauséabonde. Sueur, café, clope. L’homme devait être célibataire. Et même si son visage n’était pas très visible, tu pouvais remarquer qu’il était clairement vilain. Alors qu’il frappait à la porte du directeur, il se tourna un cours instant vers toi, renifla, et entra rapidement quand un ordre indistinct s’échappa de l’antre du seigneur de ces lieux. Et ce fut comme si tu voyais des pellicules doucement retomber au sol _comme de drôles de feuilles. L’homme était crasseux, c’était le moins que l’on puisse dire. Et tu n’avais toujours pas pu apercevoir le monstre qui se tapissait au fond de ce couloir.
« Ce n’était pas cela que je vous ai demandé… C’est exaspérant que d’être entouré d’incapables ! » A l’intérieur, tu aurais pu croire à la reconstitution de la guerre. C’était un tonnerre de reproches et d’invectives qu’émettait la voix de stentor de Pierre Clastres. Et qui pouvait bien te faire froid dans le dos… à l’imaginer hurlant, hirsute, et armé sur un champ de bataille. Pour autant que cela puisse être amusant, à l’instant même, c’était plutôt de la peur que l’homme pouvait dégager. Et cela, même à travers la porte. C’était un peu comme si le pauvre cloporte qui était entré ne faisait que représenter toute la population vivant entre ces murs et qu’il se faisait reprendre durement pour toute la fratrie. Comme si tu sentais la peur et les tremblements de toute la maison d’édition. Le patron n’était pas content du boulot… Le patron n’était pas d’humeur. En tout cas, c’était l’impression que cela donnait de l’extérieur. Ce que tu ne voyais pas, c’était la feuille qui portait ton nom, chiffonnée, au pied du directeur, abandonnée comme un insignifiant insecte que l’on écraserait par mégarde. Oui, ce que tu ne savais pas, c’était que Clastres ne pensait plus du tout à toi, mais à cette maquette bidon du prochain numéro de Liberté, ce journal vilipendant des idées quelques peu dérangeantes et vindicatives. Mais qu’il était bien dans une colère noire.
Et tu entendis le téléphone sonner. « Comment ? Mon rendez-vous ? Mais quel rendez-vous ? » Un silence s’installa. La personne à l’autre bout du fil devait certainement être en train de ‘rafraîchir’ la mémoire du patron, avec les plus belles pincettes du monde car tu perçus quelques brides de la suite de la discussion, plus calme. « saleté… rendez-vous… british… idiotie… aberrant… hors… »
Et en même temps, la poignée de la porte s’abaissa, entrouvrant la porte pour laisser passer le même petit rat _peut-être encore plus ratatiné qu’avant_ qui fila sans un regard ni une attention pour toi, encore une fois. On pouvait sentir une sorte de soulagement latent alors qu’il faisait ses pas vers sa sortie.
Et au travers de la porte entrebâillée, tu entendis l’injonction : « Entrez, jeune homme. Il semblerait que je ne vous ai fait que trop attendre… » | |
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